Mes mots me donnent mal à la tête. Ils font un vacarme intolérable. Je les entends la nuit, le jour, je les vois à l’écran, et sous mes paupières. Je les écris, pour qu’ils se taisent, mais ils restent. Ils prennent forme, ils deviennent vrais.
Mais ça c’était hier, ou ce matin, je suis pas certaine. Plus tôt de toute façon. Pas maintenant. J’ai compris tout d’un coup. Comme ça, devant la télé, et ça m’est venu. C’est mes mots, mais c’est juste ça. Je ne voudrais jamais avoir ce genre de discours à voix haute. Un peu, pour partager, un peu, pour pas exploser. Mais il y a des mots qui ne sont faits que pour être écrits, lus. Parce qu’une fois dits, ils perdent tout leur sens.
Des mots, commes des émotions, comme des souvenirs, qui ne se disent pas. Parce que j’ai ressenti, parce que je me souviens. Mais qu’est-ce que j’ai ressenti? De quoi je me souviens? C’est moi qui donne un sens à tout ça. La perception des autres, le son, le ton, c’est plus la même chose. Et je veux me souvenir de ce que j’ai ressenti, à ma façon.
Des souvenirs délicieux, des souvenirs douloureux. Des émotions trop intenses pour être racontées, trop folles pour être réelles, trop réelles pour être revécues. C’est à moi tout ça. Personne ne peut me l’enlever. Celles que je veux oublier, je n’ai qu’à les effacer. Celles que je veux revivre, je n’ai qu’à les écrire. Je n’ai pas à en parler. Et tout ce que j’écris ne me défini pas comme personne entière. Je ne suis qu’un fragment de mes mots.
Je me souviens, je me rappelle.
Le reste, c’est la vraie vie.