Osti de retour de la mort. Départ en mini-panique de New York le vendredi en soirée, avec l’annonce d’évacuation et annulation des bus du samedi. Ride de nuit avec un arm-rest hoarder, des sièges en ciment et une tristesse frisant la peine d’amour. Je me suis arraché les yeux à tenter de déceler les lumières de la ville le plus longtemps possible. J’ai pris un grand respire une fois entrée dans la noirceur de la banlieue endormie et je me suis convaincue que ce n’était que temporaire. Je reviendrais. Bientôt.
Ça ne fait pas deux semaines et j’ai pourtant l’impression que ça fait des années. J’étais dans ma chambre, lumière tamisée, Dylan, encore Dylan, jouait pendant que mes doigts se faisaient aller sur le portable. Je ne pensais plus au départ depuis mon arrivée. J’étais tellement pas prête de la quitter…
En fait, je vivais une vie qui me semblait enfin réelle. Qui était mienne. L’air, l’eau, le bruit, le silence des soirées de semaine, les matins à peine engourdis, le Times, la vélocité.
Je ne suis pas faite pour être ici, dans cette vie, cette ville. À chaque voyage je reviens un peu plus déprimée. Mais qu’est-ce qui peut bien m’empêcher de vivre ce qui m’appelle si fort que les oreilles me bourdonnent à l’année, que je n’arrive même plus à me concentrer assez longtemps pour finir un chapitre, que la poitrine me sert à chaque matin quand l’alarme me projette dans le cauchemar de mon quotidien?
I’m obviously hanging onto something that wants to be let go.
Obviously. Cause my hands are bleeding mightily now.
Je me demande si mon éternel sentiment d’être à part, n’est pas finalement un message que j’ignore depuis trop longtemps. Je me perd dans une mer virtuelle où on s’applique à me mettre dans la face que je ne fitte pas là, ni là et encore moins ici. Aucun hashtag ne m’interpelle, et mes idées, mes intérêts sont au mieux ignorés, perdus dans la cacophonie des faux timides vaniteux avides de reconnaissance virtuelle. Les liens sont compliqués, les amitiés avortées, les messages sociaux véhiculés empreints de mercantilisme déguisé en originalité.
Il aura fallu que je me perde, solide, pour réaliser que ce que je suis, qui je suis, il n’y a que moi qui puisse le comprendre vraiment.