Carole s’est suicidée le 2 janvier 2000. C’est sa mère qui me l’a appris, le lendemain, au téléphone. 29 ans. Mère. Séropositive. Plus de vécu qu’un CHSLD rempli à craquer.
Un gun. Une fille au bout de son chemin. La souffleuse passait pu depuis longtemps. Jammée de tous les bords. Le vent soufflait, la poudrerie l’aveuglait, les lampes brûlées.
La journée du service, du verglas. J’ai fait La Prairie St-Jérôme en 45 minutes pareil. Radiohead, des cigarettes, ben des kleenexes. Après la messe sa mère recevait la famille et les amis… chez Carole. Dans le même logement… une seule toilette, celle-là. J’avais pas le choix, tellement pas le choix. Je pense que j’ai vu une goutte séchée, mais j’pas certaine. Je pense.
J’étais assise sur la chaise la plus proche de la porte, de la sortie. Ça prit un homme avec une maudite pogne pour me faire rentrer, il me traînait par le bras dans le parking, je voulais pas entrer. Je les regardais manger des sandwichs pas de croûtes pis boire leur vinier, pis j’avais tellement mal au coeur. Pis la petite qui était là, jasant avec les mononcles, les matantes… me tirant par la main pour aller voir sa chambre, SA chambre, full toutous, regarde lui s’il est beau!
Je me suis presque sauvée.
Ma mère est morte le 12 décembre 2000. Non, 2000 a pas été une bonne année. Je lui tenait la main.
Deux fois la mort dans une année. La première fois elle m’a juste fait un signe de la main, de loin, juste un hey! salut man! La deuxième fois, elle m’a fait une danse à 10$. Sale pute.
Anyway. Le deuil, ça se vit différemment pour tout le monde. Les deux fois j’ai tout fermé. Pas parlé à personne, pas pris d’appels, pas écrit de lettres. J’ai écouté de la musique, lu leurs lettres, regardé leurs photos, pleuré, pleuré, pleuré, pleuré. J’ai aucune idée comment réconforter quelqu’un en deuil, et en fait, est-ce vraiment nécessaire? La réponse, le remède, c’est certainement ailleurs.
Elles vivent toujours. Je leur ai dit aurevoir à ma façon, aurevoir à leur voix, leur sourire, leurs caresses, leur présence. Mais l’amour… l’amour, ça vit toujours.
S aussi. Vlà deux ans. Maintenant je trouve ça genre moins drôle. L’expression, you know, t’as un squelette dans l’pacard. Justement c’est dans le placard qu’y s’est pendu.
La vie pour ceux qui reste c’est un chemin entre se dire que c’est son choix, et sentir le creux de l’injustice s’accrocher au ventre…Comme s,accroche le soleil anyway dans le ciel …Pour ceux qui reste.
Accepter. Never. Alive. Always.
Je trouve aussi. Le deuil se vit differemment pour tout le monde. Le mien. J,ai rie, j’ai été soulagé. Tsé porter tout l,amour de la vie pour deux. Ça devient essoufflant, et l’amour se brèche des fois. J’ai dépensé son fric. Et un an après. Je me suis effondrée. Je croyais être au dessus des malaises.
Non. Je suis toute petite devant. Armée d’espoir. J’ai juste mes deux yeux pour regarder dehors. Mais tu sais ils savent rêver. Yes sure…
Pour 3 enfants.. qui se souvienntent de leur papa à travers les miens. J’essaie au fil des printemps de faire laq paix un peu mieux à chaque bourgeons de leur sourires qui me tissent à la vie. Encore plus serré.
Merci Love-Soeur. D’ouvrir sur ça. le deuil. L’amour…
Parce que oui. L’amour ça vit toujours.
Merci. de lire. de dire.
me permet d’un peu plus guérir…
(bon wee xx)
Ce billet a fait monter le taux d’humidité devant mon écran…
Pour moi, cette « double prise », ce fut en 1998 : mon frère d’abord, en janvier, et mon père en septembre.
J’ai parfois le sentiment que, depuis, les deuils ne cessent de s’accumuler. C’est sans doute par les deuils réussis que l’on parvient à grandir. Je veux y croire, pour qu’au moins les déchirures servent à quelque chose.