Ok, ça m’a pris près d’un mois. Ça décollait pas. Puis un moment donné, à la page 195:
Si le hasard existait, il n’aurait pas décidé de laisser agir ce qui, au plus profond de lui, ne savait même pas encore qu’il aspirait à être.
Et je suis assommée, finalement. Je suis abasourdie par ma surdité. Je viens de catcher. Et je suis complètement sous le charme de cette plume froide, noire, sexy, prétentieuse, exposée.
Je ne me précipiterai pas à la bibliothèque pour me taper ses 1022 autres bouquins. C’est assez pour l’instant. Mais je suis tout à fait conquise.
Ce qu’il a de plus frustrant dans ma bibli de banlieue, c’est les traductions. Thompson, Hammett, et tous mes mecs à cigarette et fédoras, traduits. C’est pénible et désagréable, sauf quelques rares exceptions. Alors j’écume les usagés de l’ouest.
Et après Dard, qui? Noir, noir, noir je veux du noir français maintenant, mais je n’en connais pas un.
Je veux un mâle en bras de chemise, le noeud de cravate à peine lâche, le col ferme, l’odeur de la nicotine et de l’after-shave dans ses cheveux, ses mains sèches, rugueuses, chaudes, étreignant mes épaules. Je lui fait face, mon nez effleure son cou mais avant que je puisse y mettre ma bouche, avant que je sente sa peau sur mes lèvres, il me repousse, fermement.
Et il me dit de sa voix basse et graffignée par la cigarette:
” Toi et moi, poupée, c’est une histoire impossible.”